cathy-begien-career_warby-parker_garance-dore

Career / Cathy

8 years ago by

Pendant mon adolescence, les seuls jobs qui me faisaient envie, c’était dans des boutiques de prêt-à-porter. J’étais complètement obnubilée par la mode et c’était ce qui s’en approchait le plus. Le jour de mes 16 ans, je me suis trouvé un petit boulot chez The Limited Too. Après ça, j’ai travaillé dans une petite boutique de vêtements pour enfants et à la fac, j’ai bossé deux ans chez Rugby et dans une petite boutique de prêt-à-porter masculin. Toutes ces expériences m’ont appris à respecter tous ceux qui travaillent dans ces boutiques, et encore plus ceux qui ont su transformer leurs jobs d’étudiants en de vraies carrières dans la mode.

C’est là qu’intervient Cathy, qui a travaillé chez Prada avec Elle. Elle est directrice de l’identité visuelle chez Warby Parker, ce qui signifie qu’elle est responsable du visuel de tous les espaces physiques de la marque (boutiques, bureaux, showrooms, etc.). Elle a un parcours dans le retail qui forcerait l’admiration de toute jeune stagiaire. Elle a travaillé comme vendeuse puis grâce à son énergie créatrice, bâti une carrière auprès des marques les plus connues. Elle a travaillé pour Kiehl’s, Gap, The North Face, Gucci, Opening Ceremony, Cole Haan, Prada et maintenant Warby Parker, la marque retail qui monte. J’espère que vous aimerez suivre son parcours aussi vivant qu’admirable !

________________
Que voulais-tu faire plus tard quand tu étais jeune ?
Je voulais devenir artiste, à cause de Bob Ross. J’adorais son art, c’était vraiment magique à mes yeux. Ce qu’il disait, et la façon dont il le peignait.

Quand il expliquait ce qu’il faisait : « Voilà comment on fait la neige, et les sommets des montagnes, on utilise ce pinceau spécial », je me disais : « mais je pourrais tout à fait faire la même chose ! » C’était comme un tour de magie dont je me croyais capable. Je trouvais ça génial.

Les années passant, j’ai continué à vivre sur mon petit nuage : je voulais devenir écrivain, artiste. Et puis je crois que j’ai eu ma période véto : j’adorais les animaux, les chiens, les chats, les chevaux.

Où as-tu passé ton enfance ?
Hors des Etats-Unis. Mes parents… Enfin, mon père biologique était – quand mes parents se sont rencontrés – c’était un Marine. Ensuite, il a travaillé pour Air America. Il a contribué à l’évacuation du Vietnam. Il a fait sortir ma mère et toute la famille. Mais j’ai grandi avec ma mère et mon père, en Arabie Saoudite. C’est là que remontent mes premiers souvenirs, ma mère enseignait l’anglais, c’était une polyglotte accomplie, elle parlait plein de langues, donc elle donnait des cours et faisait du travail administratif. Mon père, d’après ce que j’ai compris, préparait les plannings de vol des avions. Ensuite, mes parents se sont séparés, ma mère n’aimait pas l’Arabie Saoudite, et mes parents ne s’entendaient plus. Quand on est rentrés aux Etats-Unis, elle a fait des études pour devenir coiffeuse.

Vous êtes née ici ?
Je suis née à Singapour. Mais j’ai toujours eu la nationalité américaine parce que mon père était de Richmond, en Virginie. Quand on est rentrés aux Etats-Unis, ma mère s’est remariée avec un ingénieur en électricité. Pendant ma scolarité et mes études, ma mère a toujours tout fait pour que je ne me retrouve pas avec un travail où je reste debout toute la journée. Quant à mon beau-père, il ne voyait de salut que dans les maths pour gagner de l’argent. Ou alors les sciences, ou les études d’ingénieur. Ou bla-bla-bla. Bref, j’ai réfléchi à tout ça et je me suis dit que je deviendrais rédactrice technique.

Il faut savoir se faire aider de temps de temps. Parfois, il suffit de faire ce que personne ne veut faire.

Quelles études as-tu suivies ?
J’avais choisi Biologie, Littérature et Ecriture de fiction, mais ça n’allait pas. Je suis allée à l’université de Santa Cruz. C’était la seule université qui m’acceptait en Californie. Moi qui voulais devenir rédactrice scientifique, j’échouais à tous les examens de maths ! Le seul examen que j’ai réussi, c’est océanographie. En fait je faisais du surf à Orange County, et je me sentais hyper concernée par l’océan et toutes ces choses. Et la biologie, c’était ce qui me parlait le plus de façon concrète. Finalement, je me suis retrouvée à 23 ans et mon beau-père m’a dit : « Euh, tu es célibataire, tu n’as pas de diplôme, bouge-toi. » Du coup, j’ai demandé si je pouvais arrêter les sciences et le reste.

J’ai repris l’écriture, fait quelques trucs, bouclé me études et suis partie pour San Francisco. Tout le monde me disait que pour faire de l’argent, il fallait aller dans la Silicon Valley. Donc je suis devenue productrice web, non mais vous imaginez ? Je pondais du code pour des sites Internet. J’ai commencé par travailler chez MacWorld, ça a été mon premier vrai boulot d’adulte, et j’écrivais des critiques de programmes qui seraient un peu comme les applis actuelles. Je gérais ce site de vente qu’ils avaient en plus.

Ensuite, je suis passée chez Tech TV. J’ai commencé à écrire des petits comptes-rendus et des titres sur la bourse tous les matins, c’était tellement bizarre ! Mais bon, j’étais productrice web, c’était un mélange de technologie, de créativité, et d’écriture.

Comment as-tu maîtrisé la technique du codage ?
Je suis un peu autodidacte, il y a des gens qui m’ont montré comment ça marche. Vraiment, c’est des amis qui m’ont expliqué ça. J’ai vraiment eu de la chance dans mon parcours… il faut savoir se faire aider de temps de temps. Parfois, il suffit de faire ce que personne ne veut faire. Et c’est comme ça que les gens vous aident.

Comment es-tu passée de la techno au retail ?
L’éclatement de la bulle Internet s’est produit quand j’étais chez Tech TV, et j’ai été licenciée comme tout le monde. A une époque, j’avais l’impression que plus personne autour de moi n’avait de boulot.

J’avais beaucoup d’amis qui touchaient le chômage, mais moi, ce n’était vraiment pas la vie que je voulais. Surtout pas. Donc je me suis dit que j’allais tenter ma chance dans le retail, où il y avait du boulot. Ce n’était pas forcément folichon, mais il y avait du boulot. Donc j’ai postulé chez Gap, chez American Rag, Diesel, Kiehl’s… et je suis devenue cette nana qui cumule 30 petits boulots. Quand j’ai postulé chez Gap, je me souviens que dans la queue, il y avait d’ex-PDG de la bulle Internet qui attendaient aussi leur tour. Ça a vraiment été une sacrée expérience, un truc marquant, à San Francisco.

Pendant un moment, j’ai bossé comme hôtesse chez Gap. J’ai été chez American Rag, j’habillais les sœurs Traina, en Juicy Couture, Paper Denim et Seven Jeans. J’étais une bonne vendeuse, j’avais vraiment la fibre de la vente. J’avais un truc tout bête : apprendre le nom des clientes ! Au lieu de frapper à la cabine d’essayage en disant : « Tout va bien, madame ? », mieux vaut dire : « Emily, vous avez besoin de quelque chose, d’une autre taille ? » Leur faire savoir qu’elles ont une alliée en boutique qui est là pour les aider. Pour leur éviter de courir d’un bout à l’autre du magasin.

Mais le boulot que j’ai préféré, c’est chez Kiehl’s, donc dès qu’un poste à temps plein s’est libéré là-bas, j’ai laissé tomber tous mes autres petits boulots.

J’y suis restée quelque temps, et puis le copain d’une amie d’amis qui était responsable du merchandising visuel chez Gucci m’a contactée. Son assistant s’était cassé le bras et ils avaient besoin de quelqu’un à la journée, pour l’aider à installer la nouvelle vitrine de la boutique. Je me suis dit, chouette, un peu d’argent en plus. Je suis donc allée l’aider, je n’avais jamais manié le pinceau de ma vie, je n’étais pas hyper bricoleuse. Et ça reste, à ce jour, une des vitrines les plus compliquées que j’aie eu à installer.

Bref, on a travaillé ensemble, et Vince m’a bien appréciée, du coup notre collaboration s’est poursuivie pendant trois ans. Je travaillais chez Kiehl’s et je faisais quelques heures chez Gucci pour aider Vince sur les vitrines et l’identité visuelle des magasins. Sur le coup, je n’ai pas réalisé, mais c’était un peu comme si j’étais son apprentie. Je ne m’en rendais pas compte. Je crois que le seul qui a fait la même chose que moi, c’est Humberto Leon. Il travaillait chez Old Navy, qui est aussi le groupe Gap Inc, et je me souviens qu’ensuite il a fait son chemin, il est passé chez Burberry, c’était quelqu’un que j’admirais beaucoup. Je me disais, c’est génial, je fais la même chose qu’Humberto…

Il a vraiment fait appel à mon raisonnement en faisant en sorte que j’organise les vitrines de la façon la plus rentable possible. Il m’a appris à avoir une approche plus business des vitrines.

Comment as-tu atterri chez Gap ?
Quand j’étais chez Kiehl’s, je commençais à avoir un solide carnet d’adresses. Je préparais des corbeilles-cadeaux pour mon client, qui était le directeur artistique de chez Gap. Todd Barket, propriétaire de Unionmade, que j’adore. Un jour qu’on discutait, je lui ai dit : « Vous savez, je fais parfois les vitrines de chez Gucci, si vous avez besoin d’aide sur vos vitrines, n’hésitez pas. » Il était ravi et m’a demandé mes coordonnées « Je vous dirai si mon équipe a besoin d’aide en free-lance. » Du coup, j’ai commencé à travailler pour eux en free-lance. Donc je travaillais toujours chez Kiehl’s, pour Gucci, pour Gap… ça avançait, j’étais super contente de ce que je faisais, j’avais envie de continuer dans cette voie.

J’ai fini par atterrir chez Gap, ça a été mon baptême du feu dans un groupe de plus de 900 boutiques. Là, c’est la machine. Un peu le bootcamp du retail. C’était assez marginalisant. J’étais en charge des vitrines pour GapBody Women et Hommes parfois. Mais on avait très peu de liberté.

Un truc que le gens qui ne sont pas très au fait du retail ignorent c’est que tout est segmenté en régions, donc il y a des managers régionaux, des merchandisers régionaux, et autant d’équipes chargées du visuel. Donc ça, c’est davantage quand on bosse au niveau national et international.

Tout à fait. Et c’était chouette, parce que j’ai commencé à faire des vitrines pour Gucci, on recevait des directives d’Italie, et on essayait de leur donner vie. On essayait de voir ce que ça pouvait donner, on transmettait des instructions aux graphistes pour qu’ils créent le mode d’emploi qui permettrait à toutes les équipes de toutes les boutiques de comprendre notre vision, notre message. C’était vraiment génial. Ensuite, on m’a licenciée, et j’ai traversé une période difficile.

Mais quand je suis partie, j’avais déjà pas mal de projets artistiques personnels en développement, des vidéos d’art. Chez Gap, j’ai rencontré un vrai gentleman, quelqu’un de formidable. C’est Eric Samuel Green, qui reste, à ce jour, mon mentor absolu en matière de travail, et d’équilibre vie perso-boulot.

Quels étaient tes projets artistiques ?
A San Francisco, j’ai rencontré des jeunes diplômés en cinéma de l’Art Institute à San Francisco, ils travaillaient tous au cinéma indépendant Opera Plaza, ils organisaient des projections de films dans un pub, le Edinburgh Castle. Un Coréen qui dirigeait ce pub écossais organisait des soirées Trivial le mardi, il y avait un espace au-dessus du bar que les DJ pouvaient louer pour organiser des soirées à thème. Le lundi soir, il n’y avait rien, donc le proprio laissait aux jeunes qui bossaient au ciné la possibilité de projeter des films. Donc on se matait des films comme Videodrome, Quadrophenia, Crybaby… et puis après, on s’est dit qu’on pourrait se montrer nos projets de fin d’études.

Du coup, tout le monde a commencé à se montrer ses vidéos. Je me suis greffée sur le truc, mon ami Jose m’a demandé : « Bon, tu nous montres un truc ou pas ? » Donc on s’est tous mis à faire des petits films les uns pour les autres. On a organisé des soirées à thème. C’était un joyeux bazar, il suffisait d’apporter une cassette ou un DVD, et on le passait. Et tout le monde regardait, on était vraiment soudés.

Et après Gap?
Après Gap, je suis retournée chez Kiehl’s, j’ai continué à bosser sur mes projets, Eric m’a appelée pour savoir où j’en étais, il m’a dit de venir chez The North Face pour lancer un programme autour des vitrines. Il était en charge du visuel là-bas. J’y suis allée et pour la première fois, j’ai vu tout le côté business d’une entreprise, j’ai rencontré des gens incroyables. C’était vraiment différent, pas du tout orienté « mode ».

Chez Gap, tout le monde observe les tendances, les modes, ce qui est sympa, excitant, ce qui plaît, tout en s’adressant au plus grand nombre. Alors que The North Face, c’est vraiment des vêtements et de l’équipement pour le grand air. Ça faisait un peu club de vieux garçons, ou de papas sportifs. Mais c’était super, parce qu’on était moins dans une artillerie hyper lourde. Je travaillais avec le vice-président du retail, les responsables retail, merchandising, les designers… et c’est là que j’ai appris à nouer des relations avec tous mes business partners. Le vice-président retail, c’était un peu comme un coach sportif, j’ai beaucoup appris avec lui.

Je mettais un article en vitrine et lui me demandait : « C’est quoi, ça ? » Et moi, je déblatérais : « La nouvelle chaussure trail, etc. ». Et lui : « Elle est disponible dans combien de coloris ? » Moi : « Trois, elle est géniale… » Après, il me demande la pronation de la chaussure. « 25 %. » Et là, il me dit : « Tu prends la meilleure place en vitrine pour cette chaussure à 25 % de pronation ? Et sinon ? Quoi d’autre ? Le prix ? » Il a vraiment fait appel à mon raisonnement en faisant en sorte que j’organise les vitrines de la façon la plus rentable possible. Il m’a appris à avoir une approche plus business des vitrines.

J’ai fait pas mal de choses chez The North Face, où je suis restée trois ans.

Tu manageais une équipe, là-bas ?
On était deux, avec Peggy : elle était en charge du merchandising, moi c’était plutôt les mannequins, les vitrines, les accessoires. On travaillait ensemble avec une équipe de 12 à 15 personnes chargées du merchandising visuel en boutique.

Ça fait quoi de passer de la personne à qui l’on donne les directives à celle qui donne des directives et manage une équipe ?
Je me demandais toujours ce que ferait Eric à ma place. Je crois que si j’ai autant appris auprès de lui, c’était que c’était un supérieur très empathique. Quand je fais quelque chose ou que je développe une idée, je me mets toujours à la place des employés et je me demande s’ils seront motivés par cette idée.

J’essaie d’avoir une vision plus globale. Je pense aux compétences dont j’ai besoin en boutique. Chez Warby, ce n’est pas forcément évident, visuellement. Il n’y a pas de vêtements, pas de mannequins, on vend des lunettes. Donc forcément, je ne vais pas imaginer des trucs de dingue qui pendent du plafond. Il faut aussi que ça corresponde à l’esthétique de la marque : agréable, claire, simple.

Je ne veux pas non plus adopter un écrin trop sophistiqué pour les lunettes. J’ai envie que les gens puissent les toucher, les essayer. Pour ce qui est du management de l’équipe, je me demande toujours si quelqu’un qui n’a jamais bossé sur des vitrines et lu mon brief s’en sortirait. D’un point de vue plus personnel, je n’aime pas les directives trop longues. Si les gens sont chargés de l’identité visuelle de la boutique, c’est qu’à la base ce sont des personnalités visuelles.

Mais j’ai appris quelque chose de très important en matière de décisions professionnelles : finalement, ce qui compte, ce n’est pas toujours le titre ou le salaire. Il ne faut pas prendre toutes ses décisions du seul point de vue financier ou hiérarchique.

Comment t’es-tu retrouvée à NY ?
Quand j’étais de passage à NY, j’adorais aller chez Opening Ceremony, j’appelais toujours Humberto pour qu’on aille boire un café ou déjeuner ensemble – à l’époque où il était nettement moins pris. On passait du temps ensemble.

Un jour je l’ai appelé pour qu’on se voie, il était en voyage à LA mais m’a demandé si j’aimerais faire des visuels pour lui à NY.

J’ai déménagé à NY pour bosser chez Opening Ceremony, ils m’ont prise comme directrice de l’identité visuelle et acheteuse, ce que je n’avais jamais fait. Et pour dire les choses franchement, je n’étais pas très douée. C’était difficile, j’ai tenu trois Fashion Weeks puis je me suis dit que ça n’allait pas.

Comment ça s’est passé ?
Je me suis efforcée d’utiliser les deux hémisphères de mon cerveau en même temps, pendant des heures, des heures et des heures. C’était une toute petite équipe. En fait, il y avait moi, et Chris, en boutique, qui m’aidait pour les vitrines. Et à l’achat, on était une toute petite équipe : au départ moi et une fille, puis une autre a été embauchée. On était juste trois. D’ailleurs, c’est drôle, la stagiaire, c’était Kate (Foley).

Au bout de trois Fashion Weeks, soit environ un an, j’ai trouvé que je ne faisais pas du bon boulot, j’ai eu envie de partir. Ça a été un départ tout à fait à l’amiable.

C’est à ce moment-là qu’Eric – mon mentor – est arrivé à NY, pour s’occuper des vitrines de Cole Haan, il m’a donc demandé de l’aider.

Et ensuite, tu es passée chez Prada.
Je suis restée chez Cole Haan un moment, ça se passait très bien, et je me souviens d’avoir eu une discussion avec Eric alors qu’on dinait ensemble. Il m’a dit : « Ma chérie, je crois qu’il est temps que tu fasses un peu le ménage dans ton CV. » Sur le coup, je n’ai pas compris, je me trouvais à ma place. Lui m’a convaincue qu’il fallait que je parle avec des gens, pour trouver un nouvel élan. Il m’a dit : « Ton prochain boulot, je veux que tu le choisisses. Je crois qu’il est temps que tu choisisses ce que tu vas faire après. Alors vas-y, sors, va parler avec des gens, fais-le au moins pour moi. » Et j’ai dit d’accord.

Ensuite, une amie m’a dit que Miu Miu cherchait une responsable de l’identité visuelle. J’ai repensé à ce qu’Eric m’avait dit, et je suis allée à l’entretien, j’ai vu la RH de Miu Miu, une sous-division du groupe Prada. Et j’ai vraiment eu une conversation très ouverte, pour la première fois, et c’est là que je me suis rendu compte à quel point c’était agréable d’être soi-même, de se présenter tel qu’on est au fond. A l’époque, j’avais 37 ans.

Cette femme m’a demandé de lui parler de mes influences, de ce que je pensais de Prada, Miu Miu, c’était étrange… on est passées sur autre chose, là, il s’agissait tout à coup beaucoup plus de Prada, je ne comprenais plus trop. Si on m’offrait de travailler pour Prada il fallait que je réfléchisse, c’était différent.

Ils m’ont présenté Alessandro, vice-président de l’identité visuelle chez Prada, j’ai adoré le rencontrer. Il m’a dit : « Ecoute, si tu as envie de finir tous les jours à 18 h pour retrouver ta famille, ça ne va pas être possible. » J’ai répondu que le travail ne me faisait pas peur, que je pouvais faire des journées à rallonge. J’ai juste prévenu que lorsqu’on me criait dessus, je pouvais pleurer. Mais si ça ne les dérangeait pas, ils pouvaient m’embaucher, me houspiller et me regarder pleurer, j’étais capable de tenir.

On a tous les deux été très directs, c’était une conversation intéressante : je me suis présentée telle que j’étais, je n’ai pas fait semblant d’être une Prada-addict. Je n’étais pas comme ça, je n’avais pas de sac Saffiano, mais j’avais toujours aimé Prada, depuis les années 90, j’admirais beaucoup Mme Prada, son parcours, sa marque, ce qu’elle avait bâti, la mode.

Donc j’ai quitté Cole Haan pour aller chez Prada.

« Ça me plaît » et « Ça me plaît de pouvoir mettre ça sur mon CV. » C’est complètement différent.

C’était donc la première fois – à part Gucci – que tu travaillais pour une marque de luxe.

Il y a un moment où je me suis demandé : « Cathy, est-ce que c’est vraiment ce que tu veux faire ? Bosser dans la mode ? » Parce que là, on était au cœur même de l’industrie. J’étais partagée : d’un côté, Prada, c’était vraiment le nec plus ultra pour moi, mais je connaissais aussi l’univers de la mode, les Fashion Weeks, le calendrier de dingue. Est-ce que j’avais envie de subir ça à nouveau ? Les filles hautaines ? Mais comme c’était pour Mme Prada, j’y suis allée.

Honnêtement, de tous les préjugés que j’avais, aucun ne s’est révélé vrai. De l’extérieur, on a l’impression que Prada, c’est énorme, mais à l’intérieur, c’est comme un petit village italien. J’ai beaucoup de respect pour leur façon de travailler : quand ils disent que tout le monde est sur le pont, c’est le cas ! Alessandro, le VP, se retrouve sur une échelle à fixer des spots avec moi à six heures du matin. Tout le monde bosse. Chez Prada, il n’y a pas de poste où on reste collé derrière un bureau à prendre des décisions sans mouiller le maillot. Tout le monde travaille dur, mais même quand on est super à la bourre, on prend le temps de déjeuner ensemble… C’est très italien. Mais tout le monde se bat pour rester fidèle au standing de la marque.

Quel était l’intitulé de ton poste ?
J’étais chargée du marchandising visuel pour l’Homme. C’était un peu déstabilisant, parce que j’avais déjà eu davantage de responsabilités par le passé.

Mais j’ai appris quelque chose de très important en matière de décisions professionnelles : finalement, ce qui compte, ce n’est pas toujours le titre ou le salaire. Il ne faut pas prendre toutes ses décisions du seul point de vue financier ou hiérarchique. Finalement, quand on va à un entretien, le plus important, c’est de savoir quelle expérience on retirera du poste. Ce qu’on fera, ce qu’on apprendra, l’impact qu’on aura. Savoir ce qui est important pour la marque, ses objectifs. Et voir si on peut avoir une incidence sur son développement et y contribuer.

Il n’y a pas que le poste ou le salaire. S’il s’agit de travailler sur des choses qui vous passionnent… Moi, je dis souvent « Si vous êtes prêts à le faire gratuitement, alors allez-y. » Franchement, chez Gucci, c’était presque du bénévolat. Il y a avait de jours où je gagnais 3 $ de l’heure. Mais je continuais parce que c’était intéressant, et que j’avais la possibilité de m’amuser avec une robe fraîchement arrivée des défilés. Ou que je passais la journée à coller des papillons sur un décor.

Je dis toujours aux gens : « Si ça vous plaît vraiment, allez-y. » Mais souvent, les gens ont tendance à confondre « Ça me plaît » et « Ça me plaît de pouvoir mettre ça sur mon CV. » C’est complètement différent. Chez Prada, en acceptant ce poste et ce package, je savais que je ne regretterais rien. L’intitulé du poste n’était pas génial, et alors ?

Chez Prada, je pouvais passer six heures à plier des chemises, et je ne rigole pas. Je suis la pro des piles de chemises bien alignées. Mais un jour, je pliais des chemises, et le lendemain, j’installais une expo sur les costumes du film Gatsby. C’est ça, Prada. Les gens qui installent l’expo du Met Gala ou l’expo Gatsby, ou une installation de dingue à Broadway, ce sont les mêmes qui plient des chemises… c’est pour ça qu’il faut vraiment adhérer à cette façon de travailler.

Depuis NY, comment collaborais-tu avec l’équipe en Italie ? Etais-tu responsable de ce qui se passait sur le continent américain ?
Le siège est à Milan, c’est de là-bas qu’ils nous envoyaient le brief, les photos, etc. On s’en inspirait, on voyait comment ça pouvait correspondre avec le comportement américain, et on faisait du mieux qu’on pouvait avec ce dont on disposait. L’exécution était remarquable. C’est nous qui communiquions ensuite avec nos collègues de la côte ouest.

Après Prada, tu es arrivée chez Warby Parker.
C’est Warby Parker qui m’a contactée. Je me suis dit que s’ils avaient besoin d’aide avec les visuels, je pourrais leur conseiller quelqu’un. Ils voulaient savoir si moi, je serais intéressée par le poste. Mais j’étais bien là où j’étais, et j’ai vraiment eu du mal à quitter Prada.

Mais il s’est passé un truc. J’organisais un gros événement privé, très luxueux, pour Prada. J’étais en train de boire mon expresso, dans un hôtel avec vue sur Central Park… et là, j’ai commencé à consulter Instagram. J’ai vu que mes amis avaient emmené leur fils en Afrique, pour faire un stage d’art, et que leur fils avait sept ans. Il y avait aussi des photos d’eux en train de jouer au foot, de dessiner, de rencontrer des gens… J’en ai eu la gorge nouée, j’étais jalouse. J’étais dans la suite présidentielle d’un hôtel de dingue, entourée de pièces ultra-luxueuses. Mais je n’avais qu’une envie, c’était partir loin.

Plus je me renseignais sur Warby, plus j’étais en contact avec eux, plus je comprenais le fonctionnement de la marque, en profondeur, qui est bien plus complexe que la façon dont on nous le présente. C’est beaucoup plus gratifiant, c’est toute une organisation. Et c’est là que j’ai décidé que Mme Prada n’avait plus besoin de moi.

A l’époque, Warby était encore une marque relativement jeune…
Ils fêtaient leurs quatre ans. Il y avait le showroom, les bureaux, une boutique sur Greene Street, à Washington et à Boston. Cinq boutiques en tout avec les showrooms.

Plus je me familiarisais avec la marque, plus je me rendais compte qu’elle occupait une place à part. Ils n’avaient quasiment aucune boutique, et pourtant, ils voulaient vraiment s’implanter dans le paysage retail. Je pouvais vraiment jouer un rôle, apporter mon expérience, avoir un impact, contribuer à son développement. Ça a vraiment parlé à mon petit cœur de Californienne hippie. Je me disais que j’allais pouvoir faire la différence, que mon travail aurait des répercussions positives sur plein d’autres communautés. C’est vrai, j’avais peur de revivre ce que j’avais traversé à l’époque des start-ups, mais ce que je dis souvent, c’est que Warby n’est pas une start-up. On a plus de 20 boutiques, donc il faut qu’on arrête de dire qu’on est une start-up.

Comment était l’équipe dans laquelle tu es arrivée ?
Inexistante.

Tu as été la première embauchée dans ce service ?
Oui. Je crois qu’ils se sont rendu compte qu’il y avait une énorme différence entre ce qui se passait au niveau de la direction artistique et le résultat présenté en boutique. Qui allait décider où mettre quoi et comment le mettre en valeur ? Quand je pense merchandising visuel, ou visuels en général, je vois un carrefour, une point de rencontre entre le marketing, le merchandising, le retail, l’opérationnel. Parfois il s’agit de savoir comment faire passer notre message, raconter notre histoire, parfois ça ne se passe pas comme on l’avait prévu et il faut qu’on trouve une solution. Comment créer une expérience plus ludique et interactive dans cet espace que ce soit un showroom, nos bureaux ou nos boutiques ?

Quand on trouve des idées comme ça et qu’on voit ensuite les gens se les approprier et jouer avec, ça fait vraiment super plaisir. Quand ça fonctionne tout de suite, sans forcer, qu’on arrive à faire vivre des projets, c’est très gratifiant.

Qui travaille dans ton équipe, maintenant ?
Je viens d’embaucher une troisième personne. J’étais la seule à travailler sur les visuels, donc sans équipe. Quand j’ai embauché la première personne, c’était un peu la grosse blague dans les bureaux : « Tiens, j’ai entendu dire que le département Visuels allait doubler ses effectifs ! Quelle croissance ! » L’an dernier, j’ai embauché une coordinatrice visuelle qui venait de chez CX, Lauren. CX, c’est l’équipe qui s’occupe du service clients, qui gère les lignes téléphoniques, les e-mails, les chats, le service assistance pour les problèmes divers, les commandes. L’un des gros avantages de Warby, c’est qu’il y a dans cette boîte plein de gens qui ont soif d’apprendre, de se former, qui sont hyper intelligents, bosseurs… personne ne se la joue.

Donc il y a eu Lauren et je viens d’embaucher Lucas, manager visuel, qui était chez Tom Ford Beauty. C’est un de mes vendeurs, John Valdivia, maintenant chez Kenzo, qui me l’avait recommandé. C’est un tout petit monde. Lucas est super, et je suis contente de pouvoir agrandir mon équipe pour mener notre stratégie à plus grande échelle. Quand j’ai commencé, je fabriquais les accessoires moi-même avant de les envoyer en magasin. Mais au bout d’un an, j’ai pu établir un budget, et faire rentrer tout ça dedans, c’est génial. Maintenant, j’ai un peu plus de visibilité, ça me permet de mieux travailler avec mes vendeurs.

Tu es aussi là à un tournant pour la marque, puisque Warby ouvre plusieurs points de ventes, donc c’est très motivant du point de vue développement.
Je suis super contente. Tout va tellement vite. D’ailleurs, la plus grosse difficulté de mon travail ici, c’est que beaucoup de choses arrivent très vite. On met énormément de choses en place, mais ensuite, il faut assurer le suivi de ce qu’on a mis en place.

Je peux compter sur mon équipe, qui, pendant que je m’occupe des nouvelles boutiques, continue à s’assurer que les boutiques existantes restent belles, s’occupe de ce qui ne fonctionne pas, des vitrines à changer ou à réparer. Elle m’aide aussi à avoir accès aux infos sur les boutiques existantes pour savoir comment les réutiliser dans les nouvelles boutiques.

Tout ce qui tourne autour de la communication visuelle des boutiques, c’est très stratégique ?
On retrouve nos principes de base dans toutes nos boutiques, mais chacune à sa spécificité. Elles sont toutes uniques, on ne veut surtout pas des boutiques identiques. Il faut que chacune d’entre elle soit en symbiose avec son environnement direct.

Parfois, quand on est en phase de création pour un produit, on essaie de trouver une histoire qui pourra être adaptée et déclinée dans toutes les boutiques, quelle que soit leur taille. Malheureusement, parfois, telle histoire ne fonctionne que pour une seule boutique, ou parfois on a envie d’autre chose pour certaines boutiques parce que c’est mieux adapté. On est constamment en train d’essayer de trouver des choses qui peuvent être universelles, sans se mettre d’œillères.

Qu’est-ce qui te plaît le plus dans ton travail ici ?
De voir à quel point les gens sont investis, passionnés. Parfois je fais une recherche avec le hashtag de certaines boutiques pour voir si ça fonctionne bien. A Miami, on a avait organisé un photobooth monté au plafond, parce qu’il n’y avait pas de place dans la boutique elle-même. Une boutique de lunettes où on entre juste pour acheter des lunettes, c’est monotone. C’est là que j’ai imaginé la boutique un peu comme une piscine sur laquelle on flotterait, et je me suis dit que ce serait sympa de pouvoir se prendre en photo depuis le plafond. Quand on trouve des idées comme ça et qu’on voit ensuite les gens se les approprier et jouer avec, ça fait vraiment super plaisir. Quand ça fonctionne tout de suite, sans forcer, qu’on arrive à faire vivre des projets, c’est très gratifiant.

Peu à peu, on retrouve ce côté empathique. Il faut savoir montrer de l’empathie pour les autres… ceux qui ont pensé le truc, qui l’installent, qui communiquent dessus. Plus on aide les gens, plus ils vous aident en retour.

A quoi ressemble une journée-type pour toi ?
C’est difficile à dire. Il y a des jours où je suis là, d’autres en voyage. Les jours où je vais au bureau, j’arrive, je me prends un petit-déj, je réponds aux e-mails, j’appelle des vendeurs, je me tiens au courant des différentes choses. C’est très important pour moi. Même quand quelque chose a été mis en place, j’ai besoin de savoir à quoi ça ressemble, d’avoir une photo. Je n’aime pas le silence et je n’aime pas que la communication soit au point mort.

Je passe les différents projets en revue, je vais à des réunions. Les jours où je n’ai pas de réunion, je m’occupe des projets à venir, on essaie des choses, on joue avec les tissus, les matières, on collabore avec des gens de l’extérieur. On est une toute petite équipe, mais il y a une véritable émulation créative, et c’est ce qui me plaît beaucoup dans mon travail chez Warby. Je consulte tout le monde au bureau. Mes idées me viennent des gens qui m’entourent et notamment du personnel dans les boutiques.

Quand je me projette dans une nouvelle boutique, j’imagine que je vais devoir construire une espèce de maison pour 18 personnes qui y passeront le plus clair de leurs journées. Je me dis qu’il faut que ce soit un endroit sympa, qu’ils aient envie de partager l’univers de la boutique avec les clients… C’est pour ça que j’essaie de rester à l’écoute des gens, et de moduler mes idées en fonction de leurs envies.

As-tu trouvé un juste équilibre entre ta vie personnelle et ta vie professionnelle ?
C’est encore en phase de rodage. En fait, il faut être à l’écoute de ses besoins, et savoir faire une pause. Parfois, j’ai juste besoin d’un petit break pour retrouver ma créativité. Ça ne veut pas dire que j’arrête tout, mais juste que je me fais un petit café et une sieste. J’ai besoin d’un peu d’inactivité.

Et parfois, j’ai besoin de bosser sur quelque chose qui n’a rien à voir avec Warby. C’est un peu ma passion secrète de nerd. Avec ma femme, on fait de la musique, et mon petit truc à moi, c’est les pédales de guitare à effets. Quand je rentre à la maison, c’est mon moment de détente : je m’installe devant ma console avec ma guitare et je me change les idées. Je m’intéresse aux marques de pédales hyper sophistiquées, et je sais que c’est un peu idiot, mais ça me sert de source d’inspiration. Leur façon d’utiliser les réseaux sociaux, de se vendre. C’est ce qui me motive, le vrai travail qui peut inspirer les gens.

Ton conseil à quelqu’un qui bosse dans le merchandising visuel ?
Montrez votre motivation, bossez. Je vais un peu partir du postulat qu’il s’agit de quelqu’un qui découvre cet univers, comme ça a été mon cas. Vous êtes dans une boutique, vous voyez une équipe chargée des visuels entrer et vous vous dites : « Mais c’est trop cool, ce qu’ils font. J’aimerais bien faire la même chose. Comment on s’y prend ? » Allez-y, lancez-vous, faites-le. Ça peut juste être l’initiative de faire la poussière sur les lapins décoratifs sans attendre le jour de la femme de ménage pour le faire. On s’approprie les vitrines à sa manière.

Peu à peu, on retrouve ce côté empathique. Il faut savoir montrer de l’empathie pour les autres… ceux qui ont pensé le truc, qui l’installent, qui communiquent dessus. Plus on aide les gens, plus ils vous aident en retour. Si vous restez dans votre coin à attendre que ça se passe et à critiquer, personne n’aura envie de travailler pour vous ou avec vous. Mais si vous êtes celui qui essaie toujours d’améliorer les choses, de faciliter les choses, de les rendre plus claires, mieux organisées, etc. Ça montre que vous avez un véritable intérêt pour ce boulot sans nécessairement le verbaliser.

Ton rêve pour l’avenir ?
Je ne sais pas ! Je trouve que chaque journée qui passe est la plus belle ! Je me souviens de m’être dit très jeune : « Ce serait tellement chouette de bosser pour Prada. Ou de faire des décos de vitrines. » Quand on se retrouve effectivement à le faire, la magie ne prend pas tout de suite. Il y a beaucoup de travail, ça prend du temps, plus qu’on l’imaginait. La période d’apprentissage est une phase passionnante, et ça finit par payer. Au départ, on ne sait rien faire, il n’y a pas forcément quelqu’un pour vous aider, on essaie. On tente, on rate… mais n’ayez pas peur de faire des bêtises. C’est ce que je dis tout le temps à mon équipe : si vous êtes coincé, tentez quelque chose. Je préfère de loin que vous preniez des initiatives et que vous vous trompiez, plutôt que vous baissiez les bras parce que vous ne savez pas comment faire. Faites quelque chose, même si vous vous trompez.

22 comments

Ajouter le votre
  • Damn, I’m tired of just reading all the things she did…..what a fantastic life…..kudos

  • yes, it was a bit long. but interesting too :)
    http://littleaesthete.com/

  • M E R C E D E S 24 juin 2016, 10:24 / Répondre

    Great story. So inspirational…she has a special energy, love her! … »just go out and talk to people »… so simple yet so powerful advice.
    XO M.

  • The art of making his/her own life depends on so many things …different background..origin ..encounter.. decission at every stage of life ..but one thing is sure if you have a creative spirit and perseverant,you will find your path which is unique to you and to the multiple decision that you took….so just be open mind and don’t be afraid to take decision something amazing will happen!!!and this will be only for you ,each one of us has a different path..
    with love
    Yael Guetta

    http://www.ftwwl.com

  • Cette interview est juste super intéressante!
    Ca fait du bien de se dire que tout est possible, que ce n’est pas parce qu’on a fait telles ou telles études qu’on ne peut pas changer de métier et se ré-orienter! Avec de la motivation, on peut tout réussir! Et ça fait plaisir de le lire! :)
    Bon week-end,

    Julie, Petite and So What?

  • Sunny Side 24 juin 2016, 11:24 / Répondre

    Fantastique interview Emily ! Fais en plus souvent ! Quelle humanité chez Cathy ! « Faites quelque chose même si vous vous trompez, ne baissez pas les bras  » belle conclusion ! Merci

  • Thank you Sunny Side! x

  • « Everyone works so hard but at the same time it’s like oh it’s a disaster, we have so much to do, but first we take lunch. » That’s wisdom, right there.

  • This was something he told me: ‘the next job you take, I want you to choose it. I think it’s time you actually choose what you do next. Just go out and talk, just practice for me, will you please?

    that is an amazing mentor!! and also, I’m a wee bit jealous of the vast creative endeavors she’s accomplished. I like doing 100 things as well so I relate and understand it completely – and now I want to work for you.

  • So incredibly accomplished and humble to boot. Love this post and her work at Warby is world class. Crushing it.

  • Lovely article and so representative of Cathy’s magic. Thank you Emily for such a great interview!

    Summer

  • Summer Mastous 25 juin 2016, 2:06 / Répondre

    This interview was so insightful and truly representative of Cathy’s magic! Thank you, Emily for such a great article!

    Best,
    Summer

  • Bonjour Emily, merci l’interview est géniale et elle tombe à pique car je dois faire des choix pros, ça m’a beaucoup aidé, merci encore à toi et à toute l’équipe, Garance a su s’entourer de gens géniaux, et merci à Cathy de partager son parcours avec nous, je n’ai qu’une chose à lui dire : Respect <3

  • C’est vrai que ce parcours est très intéressant, mais il ne faut pas oublier que c’est aux USA, les opportunités et les salaires sont tellement inférieurs ici…Bonne chance

  • I loved hearing Cathy’s story! So much going on in her life, and so much great advice- from her and from people she looks up to.

    The last quote really stuck with me though, « Finish it wrong, please ». I have to remind myself that sometimes too!

    Thanks for a great interview Emily! :)

  • Janet Lee 26 juin 2016, 3:19 / Répondre

    Great interview! I loved how candid it was, none of this celebrity everything is perfect and I’m so grateful b.s. SO fascinating and inspiring to hear about all the twists and turns.

  • Hyper inspirant ! Hyper positif ! Superbe article/interview ! :)

  • Samantha McKay 26 juin 2016, 10:33 / Répondre

    Love the Careers interviews you guys do. Super inspiring and encouraging to see the twists and turns people’s careers take. Reminder that it’s never linear nor is it ever ‘this is it’.

  • aurelie caroulle 30 juin 2016, 4:09 / Répondre

    Très bel article rempli de vie! merci !

  • I loved this interview – full of good advice!

  • J’ai pris mon temps pour lire cette interview, j’ai fait durer le plaisir sur plusieurs jours afin de ne pas en perdre un miette…merci pour ce très, très beau partage !

From the Archives

This or That
  • This or That
  • Holiday Gifting
  • DORÉ x THE OUTNET
  • Happy Holidays!
  • #AtelierDoréDoes
  • How To...
atelier dore this or that summer sandals chunky sandals vs. delicate sandals

This or That / Sandal Edition

This or That: American or Française?

This or That: American or Française?

atelier dore this or that lingerie lace or cotton sex month

This or That / Lingerie Edition

This or That / Blush vs. Bronzer

This or That / Blush vs. Bronzer

This or That: The Beanie

This or That: The Beanie

This or That: Nails

This or That: Nails

This or That

This or That

This Or That

This Or That

Silja Danielsen Photo

This Or That: Low Knot or Top Knot