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Dating: We’re Doing it Wrong

4 years ago by

Ce n’est pas agréable à dire mais je crois qu’en matière de dating, nous nous y prenons mal. Laissez-moi vous en dire plus.

Laura, CEO de 32 ans d’une grande entreprise de la tech, rentre dans mon bureau et se met immédiatement à pleurer. Elle est perdue parce qu’elle n’arrive pas à trouver l’amour. Après une rupture difficile à la fin de sa vingtaine, Laura s’est promis qu’elle irait à au moins deux rendez-vous amoureux par semaine pour augmenter ses chances de rencontrer l’homme idéal. Et même si elle s’applique rigoureusement à sa “chasse au mari”, comme si c’était son deuxième job, rien ne semble marcher, m’explique-t-elle : “C’est comme si j’étais insensible – aucun de ces hommes ne me donne de papillons dans le ventre. Qu’est-ce qui ne va pas chez moi ?” Et pour en rajouter encore, sa mère pense qu’elle est trop difficile et vient de passer un mois à trouver des endroits où Laura pourrait congeler ses ovocytes pour éviter une “grossesse gériatrique”.

Laura ressemble à Kyle, un musicien de 27 ans qui est venu me voir parce que, même s’il est jeune et en bonne santé, il n’arrive pas à garder son érection. Il passe la moitié de ses soirées à jouer dans des concerts et l’autre moitié sur des applis pour essayer d’obtenir des rendez-vous avec des femmes qu’il tente ensuite de convaincre de coucher avec lui. Et là, il se rend compte qu’il ne peut pas assurer : “Je ne sais pas ce qui se passe. C’est comme si je réfléchissais trop ou quelque chose comme ça, et je n’arrive plus à ressentir quoi que ce soit.” Kyle est épuisé. Il me dit qu’à ce stade, il se met lui-même autant de pression à assurer sur scène qu’en rendez-vous. Quand je lui ai demandé s’il songeait à ralentir le rythme et à se limiter à un rendez-vous par semaine, il m’a expliqué qu’il avait l’impression de devoir garder ce rythme parce qu’il était actuellement au “pic de sa vie” et que s’il ne rencontrait personne maintenant, il n’y arriverait sans doute jamais.

Je suis psychologue clinicienne dans un cabinet privé new-yorkais, spécialisée dans le soutien aux personnes qui tentent d’affronter les challenges des rendez-vous amoureux aujourd’hui. Et par conséquent, mon cabinet est plein de personnes comme Laura et Kyle. Et ne vous y trompez pas, je vois aussi beaucoup de femmes comme Laura qui ont du mal à atteindre l’orgasme ou à être excitée, et des hommes comme Kyle qui sont désespérément à la recherche de leur idéal romantique. Dans tous les cas, c’est toujours le même problème : maintenant qu’il suffit de swiper pour trouver l’amour, nous nous sommes convaincus que notre destin amoureux est entre nos mains – littéralement – et que le fait de rencontrer “notre moitié” dépend avant tout des efforts que nous sommes prêts à consacrer à cette quête. Et même si cette phrase n’est pas complètement fausse, dans la mesure où ça demande des efforts de trouver l’amour – il faut en effet se montrer disponible -, nous avons peut-être surestimé la quantité d’efforts nécessaire. Par exemple, beaucoup d’entre nous se disent que si nous ne sommes pas sur plein d’applis en même temps, à swiper d’un profil à l’autre avant de nous coucher, à swiper aux toilettes, à écrire des MPs aux gens, à organiser plein de rendez-vous avec des inconnus chaque semaine, alors nous pouvons aussi bien nous résigner à vivre seul et triste avec un chien pour seul compagnon (et il est obligé de nous aimer puisque nous le nourrissons), en attendant régulièrement qu’un voyant nous dise, une fois encore, que l’amour nous attend.

Quelle pression.

Mais voilà : l’amour ne dépend pas que de nous. Et il n’y a pas de corrélation directe entre le fait de trouver l’amour et la quantité d’efforts que nous y consacrons. En réalité, plus nous pensons que ça dépend de nous, plus nous le cherchons avec agressivité, plus nous “multiplions nos chances”, élaborons des stratégies, plus tout ça finit par inhiber nos sentiments. Et l’amour est un sentiment. C’est un processus naturel et émotionnel que nous ressentons dans nos corps. Mais, dans notre recherche d’amour aujourd’hui, j’ai peur que nous ayons, pour la plupart d’entre nous, abandonné nos corps derrière nous et que nous ayons, de manière involontaire, commencé à imiter les sites de rencontre en ressemblant à des robots au lieu d’être romantiques. En résumé, nous faisons de l’amour un jeu et nous jouons souvent au point de ne plus rien y gagner.

Je vais vous donner un exemple simple de ce mécanisme, prenons l’exemple de l’éternuement. Est-ce que vous avez déjà remarqué que quand vous prenez une pause pour vous dire “attends, je vais éternuer”, vous n’éternuez pas ? C’est la même chose avec l’excitation sexuelle et avec l’amour. Quand nous anticipons, faisons des plans ou pire, quand nous essayons de “comprendre” l’expérience que nous venons de vivre, nous cessons d’être présents dans nos corps et nous nous concentrons sur nos esprits, ce qui stoppe le processus naturel en cours. Et pour les êtres humains, l’amour n’est pas seulement un processus naturel, c’est aussi le processus naturel le plus fondamental. En matière d’évolution, l’amour – ce qui inclut l’attachement, les liens émotionnels et la procréation – est la seule raison de notre survie. Plutôt que de faire un pas en arrière pour se laisser être guidé par ce très vieux processus, les jeunes d’aujourd’hui (surprise, surprise) ont décidé de prendre le contrôle. Mais le problème, c’est que nous ne connaissons pas le chemin. Donc, au lieu d’accepter l’inconnu, nous avons imaginé des consignes et nous nous y accrochons désespérément dans l’espoir d’arriver à destination. Mais sur ce genre de terrain, nous ferions presque mieux de conduire les yeux fermés. Comme le dit Doc dans Retour vers le futur : “Là où nous allons, nous n’avons pas besoin de routes.”

Il n’y pas de route à suivre. Il n’y a pas de checklists. Il n’y a pas de “choses à faire” en amour. Il faut simplement “ressentir” et les sentiments ne peuvent pas être prédéterminés, ils ne peuvent pas être forcés. Ça se passe quand nous cessons de nous concentrer sur nos têtes pour nous concentrer sur nos coeurs, vivre dans l’instant et lâcher prise ; quand nous abandonnons notre style typiquement millennial centré sur le but et qu’à la place, nous nous souvenons que la seule chose en notre contrôle, c’est notre capacité à lâcher prise.

La prochaine fois que vous vous sentez “en retard en amour” et que votre première impulsion est de rattraper votre retard, de travailler plus, de vous mettre plus de pression, ça vaut peut-être la peine de tenter une approche différente. C’est comme si l’amour était un petit pois dans votre assiette, vous avez essayé plusieurs fois de l’attraper avec une fourchette sans y arriver. Il est peut-être temps d’essayer avec une cuillère. Il est donc peut-être temps d’abandonner les calendriers que vous avez en tête et de vous souvenir, régulièrement, que l’amour n’est pas linéaire, que ce n’est pas un procédé étape par étape où il faudrait un certain temps pour tomber amoureux, il suffit d’une étincelle pour lancer un feu. Il est peut-être temps de retourner dans votre corps, d’abandonner les sentiments douloureux associés avec le fait d’être seul, comme l’attente, la solitude, la frustration, pour être plus prêt à céder à la magie de l’amour quand il apparaît. Et pour finir, il est peut-être temps d’arrêter de consacrer autant d’efforts à votre recherche et de vous dire que vous n’avez pas à faire tout le travail vous-même. Après tout, votre partenaire est là quelque part, aussi à votre recherche.

* Les noms et détails spécifiques ont été changés pour protéger l’anonymat des patients.

8 comments

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  • This was a lovely read and I do not disagree with the premise. However, I believe the flaw may come in regards to female fertility. YES, we’d all like to “let things happen”, but for my single friends who truly want to be mothers, unfortunately, there is a biological clock. I think the stress and trauma of this is often overlooked. Seeing single friends grapple with knowing they may never have a partner with whom to conceive a child is truly a traumatic life event, and causes real, serious psychological pain. Freezing eggs and other medical interventions are often out of financial reach for single women, and it can be frustrating when people suggest these options. Adoption can also be traumatic, as I’ve witnessed several failed adoption attempts. My point is – how do you counsel a 35-40 year old single woman who desperately wants to be a mother but cannot or will not pursue this as a single person?

  • D’ailleurs, on dit souvent que « l’amour arrive toujours quand on ne s’y attend pas/plus ».
    C’est totalement logique parce qu’on se met moins de pression, on se focalise moins sur des conneries et surtout, on est prêt à recommencer une histoire parce qu’on a tourné la page précédente et surtout, parce qu’on a appris à être bien en étant seul, avant d’être bien avec quelqu’un.

    Bien qu’étant restée 3 ans sans vivre avec quelqu’un (j’ai eu quelques petites histoires mais pas les papillons dans le ventre ;)), je n’ai jamais voulu me mettre sur une appli ou un site de rencontre, de peur de rendre la relation trop « marketing » ou fausse.
    Mais c’est un choix personnel et je reverrais sûrement ma copie si je déménageais seule dans une ville où je ne connais personne…

    Bref, je n’ai pas encore vraiment analyser comment sont les « jeunes » aujourd’hui dans leurs relations amoureuses (j’ai 30 ans et je parle des ado, jeunes adultes) mais concernant les gens de mon âge, je trouve ça très compliqué alors que ça devrait être simple.
    Les hommes particulièrement, se mettent beaucoup de pression je trouve. J’ai beaucoup d’amis qui me disent « on ne sait pas si on doit continuer à être galant, si vous attendez un mec un peu « macho », si vous voulez qu’on dise vraiment ce qu’on pense, si on doit toujours être au top, si on doit vous tenir la porte, … » je les trouve assez perdu face au féminisme par exemple.
    Et les femmes, nous avons parfois le même souci quand on veut dire à un mec « pour moi, être féministe ce n’est pas vouloir t’émasculer, juste être ton égal », on doit souvent se justifier car tous ces mouvements (qui ont leur raison d’être, attention :)) ont créé un fossé entre les hommes et les femmes, on s’est éloignés au lieu de devenir alliés.
    Je trouve ça important de le souligner car dans nos conversations entre amis de mon âge, le sujet revient souvent : on ne se comprend pas toujours et on n’essaye pas vraiment, de peur de déclencher un conflit.
    Peut-être que nous sommes une génération en pleine transition ? Et que nous avons du mal à trouver notre place et donc, la personne qu’il nous faut ?

    Voilà, je suis peut-être totalement dans le faux mais j’avais envie de partager mon ressenti sur ce sujet qui me touche beaucoup.

    Bonne continuation et merci pour tous ces articles très intéressants partagés ici.

    Manon

  • Je me suis tout à fait retrouvée dans la description de ces personnes qui cherchent l’âme soeur et qui sont partagées entre, croire que « la » rencontre va se faire toute seule, et la nécessité d’entreprendre tout une série d’actions pour rencontrer l’amour. Pendant longtemps, dans mes histoires, l’un était amoureux, l’autre moins, et l’histoire a pris fin. Je ne comprenais pas pourquoi je ne trouvais pas ma moitié, et puis un beau jour, sans que je l’identifie comme une rencontre, j’ai rencontré l’amour de ma vie. Cela s’est mis en place comme çà.
    Je pensais que je ferais comme tout le monde qu’un jour je rencontrerai un homme, je me marierai et j’aurai des enfants. En réalité, il en a été autrement. Je suis avec un homme divorcé qui a trois enfants et on créée, au fil du temps, un nouvel ensemble.

  • Je ne sais pas comment c’est « aujourd’hui » et je n’ai jamais « daté » de ma vie. D’ailleurs ce concept me paraît super capitaliste et très américain…,mais peut-être que ça se passe comme ça maintenant partout dans tous les pays occidentaux? Ailleurs c’est encore différent…
    Je crois que la plupart des gens ont juste besoin de vivre sans trop se prendre la tête, d’être ouvert et surtout d’être bien avec soi…Après il y a le facteur chance. ça accroche ou pas à un moment donné. Après derrière le mot « amour » on met aussi chacun des choses différentes. Pour certains c’est la passion, les papillons dans le ventre ( pour moi non!!!!), pour moi c’est une histoire d’amitié-amoureuse ponctuée de beaucoup de rires et du plaisir d’être ensembles…Je crois que chacun doit inventer ou trouver ce dont il a vraiment besoin et pas les histoires que nous vendent la société. Mais c’est vrai que plus on vieillit plus il semble difficile de faire une rencontre.

  • Anne Carbonnet 6 octobre 2019, 11:03 / Répondre

    Il y a longtemps que je n’avais pas lu quelque chose d’aussi intelligent sur ce sujet…

  • Je suis vraiment bluffée par cet article, oui, comme le dit Anne ci-dessus, il y avait longtemps que je n’avais pas lu quelque chose d’aussi intéressant sur le sujet.
    J’ai tendance à penser que plus on cherche, moins on trouve, et souvent, l’amour nous tombe dessus lorsqu’on s’y attend le moins. Il faut cependant sortir, faire des rencontres. Cela marche ou cela ne marche pas, mais ce ne sont pas des échecs, ce sont des expériences…
    J’étais désespérée à 30 ans de ne pas avoir encore fondé de famille et je me sentais « vieille » et prête à adopter toute seule (la fameuse pression sociale et l’horloge biologique qui tourne), puis j’ai rencontré le père des mes filles, j’ai eu des jumelles à 37 ans (et non, je n’étais pas une senior comme on me l’a fait penser, ça a mis 5 mois naturellement, les femmes peuvent avoir des enfants au-delà de la quarantaine et marre du jeunisme!) En France l’âge moyen du premier enfant est 29 ans, alors on a de la marge. Pour aimer avec ou sans enfants, chacun fait sa vie et la mène comme il l’entend!
    Et puis après mon divorce je me suis dit que j’étais prête à mettre à la poubelle (ménopause, retraite et mort) et j’ai rencontré l’amour, comme ça, par hasard, deux grands yeux verts qui avaient vécu la même chose que moi, et nos trois enfants ont le même âge. C’est chacun chez soi pour se reconstruire, mais on est heureux comme ça. Par contre je ne fais pas de publicité de notre amour, ce n’est pas toujours facile, c’est même très dur la vie en couple ou avec des enfants, et c’est très difficile de rencontrer quelqu’un, mais pas impossible. Message d’espoir d’une femme de 47 ans qui est enfin bien dans ses baskets et qui vous dit que l’amour n’a pas d’âge. J’ai vu un couple de beaux retraités main dans la main sur une plage du sud de la France ce week-end et j’ai trouvé cela vraiment beau, ils étaient magnifiques et cela m’a donné envie d’y croire… Nous ne sommes pas des biens de consommation, et halte à cette mascarade de la foire aux bestiaux. Redevons humains…
    Et surtout Aimons-nous nous-mêmes, car il est impossible d’être bien aimé si l’on ne s’aime pas.

  • Très belle analyse et toujours cette belle écriture. Avec la maturité on apprend que oui la vie est pleine de surprises et que oui elle ne demande pas à être maîtrisée, elle demande simplement à être vécue. Merci Garance.

  • Je pense qu’il est toujours plus agréable de rencontrer l’amour dans la rue plutôt que derrière son téléphone ou son ordinateur… même si il faut l’avouer pour certains types de rencontres comme les rencontres que je qualifierais de discrètes ( libertines, coquines…) les applications de rencontres sont parfois utiles car il est difficile d’aborder quelqu’un dans le rue pour lui demander s’il veut faire un plan à 3 avec sa copine … Alors qu’une petite annonce anonyme sur un site du style : https://www.gareauxcoquines.com/plancul/lille-59-a.html permet d’éviter les regards de travers et de trouver son bonheur car oui il y a des femmes qui ont des envies coquines … bisous

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