Atelier Doré

Un des trucs les plus sympas que j’ai la chance de faire à l’Atelier n’a au premier abord rien à voir avec l’intitulé de mon poste… et en l’occurrence, c’est rencontrer et discuter avec des artistes que j’admire. J’avais souvent l’impression que l’art était un univers inaccessible, bien loin de ma zone de confort, mais ça c’était avant de rencontrer Kelly Beeman.

Kelly est une artiste dont les œuvres colorées d’inspiration post-expressionniste ont séduit des gens comme Garance ou moi, mais aussi des marques comme J.W. Anderson. Avoir la chance d’interviewer des gens pour qui on a un immense respect, quel que soit leur domaine, peut-être une vraie source d’inspiration. En discutant avec Kelly, j’ai découvert quelqu’un de très à l’aise dans sa créativité, une femme structurée par un sens du style, une discipline et une inspiration.

Où as-tu grandi ?
A Oklahoma City, et j’y ai vécu jusqu’à l’âge de 18 ans.

Comment t’es-tu mise à la peinture ? Tu as toujours peint ? Tu as fait des études d’art ?
J’ai toujours adoré dessiner. Quand j’étais petite, avec mes sœurs, on créait des histoires qu’on illustrait. C’était des sagas qui se poursuivaient sur plusieurs semaines. Chaque jour, il y avait un nouveau rebondissement ou un nouveau personnage. C’était surtout des histoires d’ados (parce qu’on avait hâte d’avoir ces âges-là) avec des vies hyper détaillées… on n’a jamais eu de Barbie, donc c’était un bon substitut.

Moi, j’étais aussi très intéressée par la peinture et son aspect technique. Ma mère est une artiste, elle faisait de magnifiques aquarelles de paysages. Elle m’a appris comment mélanger les couleurs, les appliquer, etc. Je devais avoir quatre ou cinq ans quand j’ai commencé à la regarder peindre à l’aquarelle, je trouvais ça fascinant.

A 12 ans, j’ai commencé à peindre sur des toiles. J’ai fréquenté un lycée avec option arts plastiques, j’y ai eu des enseignants géniaux qui m’ont énormément appris. Ça a été ma seule formation artistique, puisqu’ensuite, j’ai étudié la sociologie.

Parle-nous de la façon dont tu travailles. Tes toiles ont un style assez identifiable. Comment as-tu trouvé ton style de peinture actuel ?
Je crois qu’on finit par trouver son style quand on travaille depuis de nombreuses années. Mais sinon, je ne sais pas trop comment j’en suis arrivée à ce style. Il y a deux ans, je n’aurais pas pu prédire à quoi ressemblerait mon travail aujourd’hui, donc je ne sais absolument pas comment il va évoluer à l’avenir. J’ai fait du nu pendant de nombreuses années, et puis je me suis rendu compte que les vêtements renseignaient beaucoup la personnalité des gens, donc pour l’instant, je me fais plaisir en travaillant dans ce sens.

Au départ, il y a toujours une image mentale. Parfois, avant de m’endormir, j’imagine des photos, différents scénarios, dont j’essaie de me souvenir le lendemain matin. Je peins et dessine surtout des gens sortis de mon imagination, et je me sers de la mode pour leur donner de la personnalité. Une fois que j’ai trouvé une idée de tableau, je parcours les collections pour trouver des pièces qui renforceront un trait de personnalité que je souhaite donner à mes personnages. Une fois que j’ai trouvé l’idée et que je suis prête à peindre, je dessine un premier jet au crayon que je colore à l’aquarelle ou autre.

Comment cette collaboration avec JW Anderson est-elle venue ?
C’est assez drôle… Je ne connaissais pas grand-chose à la mode à l’époque et j’utilisais à peine Instagram. Mais j’étais toujours en quête de vêtements qui pourraient me donner des idées, m’aider à donner vie à des images visuelles. Un jour, je parcourais les collections sur Style.com et je me suis dit que je ne trouvais rien qui me parlait.

Finalement, je suis tombée sur J.W. Anderson, j’ai cliqué sur une collection croisière, et là, j’ai eu un gros coup de foudre. Ce jour-là, j’ai fait quelques dessins et j’en ai partagé un avec Jonathan Anderson de chez JW Anderson sur Instagram. J’étais sûre qu’ils ne le verraient jamais. Du coup, j’ai été très surprise de recevoir un retour aussi positif. Et depuis, on collabore ensemble… chaque saison, je crée des œuvres originales pour leurs bureaux de Londres.

Comment préfères-tu travailler ? En silence ou en musique ? Y a-t-il un endroit en particulier où tu aimes travailler ?
Ça dépend… parfois je travaille en silence, ou en musique, ou avec le même morceau qui tourne en boucle. J’aime beaucoup travailler le matin. En ce moment, je fais de grandes huiles sur toile, et je dois les laisser sécher toute la nuit… du coup, le matin, je me réveille hyper tôt, super contente de continuer à peindre.

Je travaille dans mon appartement. Ce n’est pas vraiment idéal, parce que c’est un appart tout petit, typiquement new-yorkais… mais à l’intérieur, tout est lié à mon processus créatif. J’ai un piano qui occupe beaucoup d’espace. Mais ça me permet de me vider la tête quand j’ai peint toute la journée. J’aime aussi beaucoup la chance de ne pas avoir à aller ailleurs pour travailler. Quand j’ai envie de peindre (la plupart du temps), tout ce dont j’ai besoin est juste là, autour de moi

Tes trois principales sources d’inspiration…
Les gens, les histoires, la mode.

As-tu déjà exposé dans une galerie ? Quand a lieu ta prochaine exposition ?
Pas officiellement… mais je fais une résidence d’artiste et j’aurai droit à ma propre expo au 3125C à Los Angeles. On essaie encore de trouver les dates, mais ce sera cet automne. J’ai hâte !