Freedom from Consumerism
5 years ago by
Nous vous présentons Maxine Bédat ! C’est une superstar dans le monde du développement durable et la directrice du New Standard Institute, une organisation qui cherche à transformer l’industrie du vêtement mondial en mettant en place des objectifs liés à l’environnement et au travail importants et fondés sur la science.
Et ce qui est encore mieux, c’est que pendant les prochains mois, Garance va travailler avec le New Standard Institute en tant que consultante.
Comme c’est le mois de la “liberté” à DORÉ, nous avons demandé à Maxine de nous parler de la manière dont elle a réussi à se libérer d’un système de consommation souvent préjudiciable en ce qui concerne la mode. Elle a réussi au passage à créer des relations plus profondes et durables avec les vêtements qu’elle choisit – neufs ou vintage – qui nous ont permis de tout repenser, de la manière dont nous nous habillons jusqu’à la manière dont nous nettoyons nos placards.
Avant, il me fallait des heures pour m’habiller. Avec un placard qui débordait de vêtements, j’avais du mal à composer des tenues. C’était un combat frustrant au quotidien. En tant que femmes, nous avons tendance à nous moquer de notre apparent problème de n’avoir – malgré de grosses preuves du contraire – rien à nous mettre.
Mais derrière notre problème “superficiel” et stupide, que le shopping est censé guérir, il y a tout un système qui a été créé précisément pour nous donner cette impression – un système qui ignore la planète, nous laisse malheureuses tout en nous donnant l’impression que c’est notre faute.
Vous êtes prête à creuser plus loin ?
Vous voyez, quand on nous dit que la mode (et tous nos autres biens de consommation) sert à satisfaire la demande des clients ? Eh bien, prenons un peu de distance pour voir si c’est vrai.
Pour ça, j’ai besoin de vous présenter Edward Bernays, le neveu de Sigmund Freud, et le créateur de la discipline des Relations Publiques. Dans les années 1920, Bernays a reçu un exemplaire du livre de son oncle sur l’inconscient, “Introduction à la Psychanalyse”, et il a décidé qu’il pourrait utiliser les désirs inconscients des gens pour gagner de l’argent (tellement américain de sa part). Une de ses premières expériences ? Un travail pour son client George Hill, le président de l’American Tobacco Corporation, pour convaincre les femmes de commencer à fumer. A l’époque, fumer n’était pas accepté socialement pour les femmes. Ce qui était bon pour vos poumons, vos vies, mais bon, tout un marché perdu pour l’industrie de la cigarette.
Bernays a travaillé avec un psychanalyste américain qui lui a dit que les cigarettes étaient un symbole du pénis et du pouvoir sexuel masculin. Il a expliqué à Bernays que s’il pouvait trouver le moyen de créer un lien entre les cigarettes et l’idée d’une remise en question du pouvoir masculin, alors les femmes commenceraient à fumer pour pouvoir avoir leur propre pénis.
Et c’est avec cette idée que Bernays a décidé de développer une grande opération médiatique. Pendant la parade de Pâques de New York, il a persuadé un groupe de riches débutantes de cacher des cigarettes sous leurs vêtements. Elles étaient censées rejoindre la parade et allumer leurs cigarettes de manière théâtrale à son signal. Bernays a ensuite prévenu la presse qu’il avait entendu qu’un groupe de suffragettes se préparait à une manifestation qui s’appelait les Torches de la Liberté (c’est une histoire vraie).
Le lendemain, on retrouvait ça non seulement dans tous les journaux de New York mais aussi dans tous les États-Unis, dans le monde entier. Et à partir de là, les ventes de cigarettes aux femmes ont commencé à grimper. Ce que Bernays avait réussi à créer, c’était l’idée qu’une femme qui fumait devenait plus puissante et plus indépendante. Une idée qui persiste encore aujourd’hui. Bizarrement, pour s’émanciper, il fallait en passer par un petit bâton de cancer. Cela lui a permis de se rendre compte qu’il était possible de convaincre les gens d’agir de manière irrationnelle à condition de créer un lien entre les produits et leurs désirs ou sentiments émotionnels. L’idée que le tabac libérait les femmes d’une quelconque manière était complètement irrationnelle. Mais cela leur permettait de se sentir plus indépendantes. Cela voulait dire que des objets inutiles pouvaient devenir des symboles émotionnels puissants de la manière dont on veut être vus par les autres.
Bernays a connu un succès extraordinaire et il a commencé à travailler avec des dirigeants des banques les plus importantes, ou des représentants d’état afin d’utiliser “l’inconscient”, pas seulement pour vendre des cigarettes mais pour changer toute la société. Comme un banquier de Wall Street l’a dit crûment à l’époque “Nous devons faire passer l’Amérique d’une culture des “besoins” à une culture des “désirs”. Les gens doivent être conditionnés à désirer, à vouloir de nouvelles choses avant même que l’ancienne n’ait été entièrement consommée. Nous devons développer une nouvelle mentalité en Amérique. Les désirs des hommes doivent surplomber leurs besoins.”
Et voilà le projet sur lequel les professionnels du marketing travaillent depuis. Nous convaincre de désirer des choses que nous ne voulons pas vraiment. Nous, les consommateurs, “n’exigeons” pas plus, nous subissons un marketing agressif pour désirer plus.
L’idée même que nous sommes avant tout des “consommateurs” a été construite, comme l’a relevé un journaliste de l’époque : “Un changement a transformé notre démocratie, on l’appelle le consumérisme. Le rôle premier d’un citoyen américain dans son pays n’est pas d’être citoyen, mais d’être consommateur.”
Et cette idée que les vêtements sont un reflet de soi ? Bernays a aussi joué un rôle là-dedans. Il a organisé des défilés de mode dans les grands magasins, et il a payé des célébrités pour répéter le nouveau message essentiel, on n’achète pas les choses simplement parce qu’on en a besoin, mais pour montrer son identité profonde aux autres.
Maintenant, je n’aime pas qu’on me trompe et une fois que j’ai commencé à voir les choses dans ce contexte, ma relation avec mon placard a commencé à changer. Je n’abandonnais plus mon argent durement gagné aux professionnels du marketing. J’ai commencé une exploration – pas à partir des magazines ou d’Instagram, mais à l’intérieur de moi-même (vous voyez, en étant seule avec moi-même). Après avoir supprimé l’application de mon téléphone, j’ai passé du temps à regarder les autres femmes dans la rue et à essayer les vêtements dans mon placard. J’avais besoin d’apprendre ce que j’aimais vraiment.
A partir de cette exploration, j’ai fini par comprendre que la chose la plus importante pour moi, c’est si un vêtement me va et comment je me sens dedans – pas de chemises trop moulantes ou de talons trop hauts. Un pantalon parfaitement ajusté avec une chemise légère rentrée exactement comme il faut dans mon pantalon et je me sens à l’aise et sûre de moi. C’est vraiment la personne que j’aime montrer. Je continue à aimer les beaux vêtements et les vêtements sont même devenus quelque chose que j’apprécie vraiment au lieu de stresser à ce sujet.
Mon placard n’est plus rempli de vêtements jetables. J’investis et je protège les beaux vêtements qui se ne contentent plus de prendre la poussière dans mon placard, mais sont portés et savourés pendant des années.
La machine du marketing de la mode est partie en surchauffe. Il suffit de regarder la liste des milliardaires de Forbes, elle est pleine d’hommes qui possèdent les grandes entreprises de mode. A jouer avec nos insécurités, nous tendre l’appât pour nous transformer en consommateurs qui achètent sans réfléchir, sans s’arrêter – ça a fait la fortune d’un petit nombre de personnes et il y a un impact environnemental énorme (sans même parler de l’impact sur les femmes clouées à une machine à coudre pour faire tous ces vêtements). L’industrie de la mode a une empreinte carbone plus grande que tous les voyages internationaux, elle contribue à la déforestation, à la dégradation des sols, à la pollution des eaux, à la pollution plastique (vous saviez que la plupart des vêtements bon marché sont faits de plastique ?) et tous nos produits usagés finissent par être rejetés vers les pays en en développement, pour ajouter de la croissance à ces économies.
Le résultat de ce temps passé dans mon placard, c’est que je me suis libérée du marketing, que j’ai pris confiance dans mon propre style et que, au passage, j’ai réduit de manière colossale ma propre empreinte carbone. C’est l’heure de la vraie liberté.
Yes yes yes! This is more of want I want to see. The history of PR and the cigarette stunt ?. We have to be stronger! Dore team, truly I realize you make money with the click through links on clothing shop the stories features – but this also is part of our societies problem with too many clothes ( I think). It’s so easy to click and buy because we see an “influencer” (despise this term) or a model in magazine wearing a good outfit and we want it. It’s a viscous cycle and I think some women can sit back , admire an Internet or print look and pause before purchase, but other gals who may not have mastered their impulse control (for lack of a better way to describe the lack of resistance to marketing), and still have that need to fit in, may not be able to resist ,so click click and it just goes round and round. Women are making some man (Forbes) richer , harming the environment etc with our desire to look fashiony/project an Instagram worthy image day in day out. It’s all a silly game. I’d love a huge Revolution against it all! Truly it’s taken me a few decades to realize this and say I’m not playing anymore (80’s excess kid here all grown up now.) I too favor comfort and have found some brilliant companies that make lovely day to day clothes that are eco friendly, are high quality and pretty in understated ways (these may not work for people that need to dress in suits etc for work but for more casual moments – so lovely http://www.gaiaconceptions.com and http://www.sweetskins.com .) I hope this message is well received by the younger readers here on Dore. It’s an important message. Step away from Instagram influencers, don’t be swayed by Marketing and get in touch with what YOU truly like. We all must be more mindful with clothing purchases. Thank you for bringing important this discussion to the community. I look forward to more!
To true, welcome aboard….
Intéressant cette histoire de Bernays
Could not be happier to see this post, and here. Being intentional and content in what you choose to include in your life is such a source of freedom – I am amazed at how much less stressed I am these days, now that my closet is pared back to the things I love. I take so much more joy in my clothes. I also notice – profoundly – that when my body is in shape and healthy and well, my clothes seem far less important.
What a great article and thank you for the history and inspiring personal story.
I too have realised that I actually have plenty of really lovely clothes that just need to be worn differently and paired with existing items I haven’t put together before. It has opened up my wardrobe so much and I’m very happy with my ‘old’ clothes just worn in a new way. I find inspiration from magazines but not the need to go and consume the way I did before.
I’ve never been able to spend a lot of money, however, I had so much I wasn’t wearing. Sub consciously that made me feel guilty whenever I bought something new but now I really do think about what I’m considering buying much more seriously and whether it can be mixed with my existing wardrobe.
Thank you for this fantastic and refreshing post!
I have found Esty to be a great place to replace worn out closet pieces with quality fabrics and often custom made. Recently had a pure silk wedding dress made for 150.00! I will later shorten and wear to dinners and parties. I also purchase several pure linen pieces again custom for not much money. Linen lasts forever! I am looking forward to many well dressed summers in the coming years. Not everyone can afford designer prices. I find it very difficult to justify paying high prices for synthetic fabrics designer or not. I have had good experiences working with the always women owned companies on Esty. Now if I could just find the perfect white organic cotton t-shirt……..
Hey Tracy!
On perfect organic cotton white T – check out For Days.
I subscribed myself and am so happy. I don’t go crazy updating my tees every month, but it certainly is a better option when dealing with those natural-deodorant-urmpit-stains. Send your oldie to them, they’ll recycle it for you, and you’ll get a fresh clean one.
https://fordays.com/
Thank you for such a thought provoking post! More like this please! Love the work of the entire Dore team x
THIS! Articles like this can effect change — in individuals and in the fashion and beauty industries. This was beautifully written and presented. Looking forward to more more more.
Bonjour, merci infiniment pour ce beau portrait et cette voix indispensable à porter. C’est un grand pas pour l’industrie que de voir un média de l’ampleur de l’Atelier Doré aborder cette problématique.
Nous avons publié un article à sujet, tentant d’expliquer pourquoi le bonheur ne se niche pas dans un énième blazer, que l’identité vestimentaire est une quête intérieure et qu’avoir un style et un dressing à soi -consciemment choisi- c’est être durable et c’est vertueux écologiquement.
Je vous invite à le lire ici si vous le souhaitez : https://bit.ly/2YrmHDw.
Thegoodgoods est un jeune media dédié à la mode et à l’écologie. On y traite des sujets de fond sur l’environnement et l’industrie (les microfibres plastiques, le « cuir vegan », les soldes) mais aussi sur l’image, l’histoire des vêtements et l’importance d’être soi (avec une part belle faite à la seconde main !).
Il y a un an, j’ai eu le privilège d’interviewer Nadine Farag, associée à Maxine Bédat sur le projet Zady. Son portrait est également sur notre site.
Plus personnellement, je suis une assidue du travail de Garance et suis fascinée par l’intelligence de son parcours et sa faculté à communiquer en transparence sur ses transitions personnelles et professionnelles, dont le sujet de la slowfashion fait partie. Je serais infiniment honorée de la recevoir sur notre chaîne de podcasts pour en parler.
Merci à toute l’équipe et belle continuation,
Victoire Satto
*_* ! And Congratulations G. for your new Gig !!!
I grew up with a mum who sewed and I also grew up wearing my 3 brothers’ hand-me-downs. I was a total tom boy, who, as a music student worked in fashion and developed a real appreciation for good fabrics and well cut clothes. I was totally sucked into the consumerism void for a while there, as the music industry is so image conscious. It’s damaging and expensive. When you know the ‘cost’ price of clothing you will NEVER pay full price again! I wait for sales now, buy what I actually need and what really suits my athletic shape and would much rather save my money for equipment and more education! I totally understand how images pull you in and get you spending. It can be addictive.
I’d love to see less consumerism in fashion, however, I’d also like to know the brand of those shoes she is wearing ?
I writing this comment before I even read it, because it’s been a long time coming and I’ve been waiting patiently for you all, while staying active. I might add, our need to compensate and to consume reaches far beyond fashion… That said our desire to be creative, to be a part of something greater than ourselves and to be accepted is real. Style trumps fashion, is more sustainable and just so much more fun…. Looking forward to read articles ?
Thanks for adressing this fact. I’m really glad that this kind of information / truth is coming out. The choices we make on a daisy basis have an enormous impact, so we really MUST make the best choices possible, yes also about our wardrobe cause we made already too many fashion victims!
I applaud Garance & the Dore team for engaging & focusing on the need for sustainability in the Fashion Industry.
While living in Marseille last year I attended an ‘Anti_Fashion’ weekend as part of Maison Mode Méditerranée led by Li Edelkoort. It was incredibly inspiring to hear & see all the speakers from all facets of the industry.
#6 of the Fashion Revolution manifesto is very motivating:-
‘Fashion conserves & restores the environment. It does not deplete precious resources, degrade or soil, pollute our air or water or harm our health. Fashion protects the welfare of all living things & safeguards our diverse ecosystems.’
Oona – Nouvelle Zélande
EXACTLY. And well done to the Dore team for publishing it
I’m already practicing this philosophy (I’m 27, but I’be been doing this since I was 21). I curate my wardrobe like it’s an art collection, only beautiful, timeless, elegant and high craftsmanship pieces I love and will wear forever are added to my collection. Sometimes I wait years to find the perfect piece or vintage item, and its amazing once I buy it because I know I will treasure it and wear it all the time. Less is always better(:
Want to indulge in something new, of good quality and at a price you can afford? But recycled! I was always a “head straight for the clearance rack” shopper and very value oriented. I have now taken a step further….I buy almost exclusively used clothing. I am able to buy top quality at amazing prices, find basics that I can’t find in a store because they are not trending and get to recycle materials and labor at the same time! I love my wardrobe. I am excited to get dressed every day. And I love that those perfect pair of Cole Haans and Coach bag that look amazing set me back less than $25 each! I rarely pay more than $20 for anything I buy used and get more compliments on what I wear while wearing things that I love than I ever got wearing something I paid a lot more for. And everything is “new to me”! All you need to do is wash or dry clean and it is as fresh as any item already in your dresser or closet.
Thank you for this excellent content! I always recommend “The Century of the Self” on YouTube, for an introduction to Bernays and the ways in which we are generationally manipulated.
I rarely read about fashion anymore because it’s all fluff and banality. But this smart piece here has made my day. I’m loving the direction that you’re going with this type of inclusivity. It speaks to the thinking woman with a true understanding of style and substance over fashion.
THANK YOU! this smart, independent and powerful piece inspires me and does make me aware of how buying less, consuming less is tied to freedom—not just my own but others’.
I like good clothing with a good design and good (natural) fabrics. I spend more money on fewer clothes, so I go for quality and not for quantity so that I can wear my favorites for a long time. I even have a few items of clothing that are more than 15 years old and feel bad when they get worn out. I usually buy something every season, but just to fit in with everything I already have. And I even do the same with food and the little amount of cosmetics I use. This way of life makes ME feel good too! @fabiduister
Merci pour cet article tellement intéressant. C’est en lisant les expériences des autres que l’on enrichit sa vision du monde. Je suis une fan inconditionnelle de Garance Doré :). J’habite dans un petit patelin de l’agglomération d’Orléans, mais grâce à internet je me balade à travers le monde, du fond de mon fauteuil, au milieu de mon salon où les enfants se chamaillent lors d’une partie de triominos. Je savoure les articles et interviews de personnalités loin de mon univers mais qui m’inspirent tout autant ! MERCI encore pour vos articles et rencontres et continuez à nous informer et à nous pousser à nous interroger sur le monde de la mode, cosmétique, cuisine, lifestyle … Je suis certes ce que l’on appelle communément « une ménagère » de moins de 45 ans, mais j’ai un esprit curieux avide de rencontres et de découvertes. N’ayant pas les moyens de voyager et de rencontrer du monde, le net reste ma fenêtre d’escapade quotidienne ;) !!!
If you are going to mention Bernays in such extent, maybe an idea to share the source material; documentary on Bernays and his methods: https://m.youtube.com/watch?v=eJ3RzGoQC4s
One quote from Vivienne Westwood : ‘buy less, choose well and make it last’